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3 septembre 2011 6 03 /09 /septembre /2011 20:45

 

 chap.1 sur 2

Le lotissement et les chats, la nuit.

 

Il y eut un temps où j'aimais l'ombre des jeunes filles en fleurs ; mais, ces années dépassées, les lumières des vieux sages en livres me sont d'un plus doux repos...

Longtemps, je me suis lavé le bonheur à grands traits de relance sur le tapis au casino des jours. Désormais, je me lève de bonne heure, buvant d'un trait un café, sombre comme un tapis devant une fenêtre en chemise de nuit.

J’y vois combien les chats, avec leurs silences, et leurs refus d'obéir à plus que leur affection obstinée, démontrent une radicale modernité sous des allures d’initiés aux mystères d’Amon-Râ.

La TSF diffuse Chose-Culture :

« Aujourd'hui, l'un des défis, voire une des modes les plus tenaces, est bien la mystique, ou la spiritualité que des individus lambda… ».

Notre époque a derechef du vague à l’âme, de la houle dans l’existence, des questions d’épouses de marins à fleur de jetée : chacun préfère croire ceci ou cela, malgré le crachin, ou à cause dudit poudrin. Tout est choix, même le refus du choix. Le premier moteur seul est immobile. Je ne parle pas du deux-roues qui dans cette fin de nuit troue le silence. Puis la mer en se retirant, inlassable, crée les continents. C’est nous, les gars et garces de cette marine-là. Nous logeons dans des opinions certifiées conformes.

Les points de vue où nous sommes assignés à résidence, par héritage ou par choix, sont de petits pavillons, chacun cerné d’un carré de jardin. Les plus récents sont produits en série : il faut bien résider quelque part, avoir une identité, un quant-à-soi.

Les murs entre nos jardins les signent. Tout ce qui est habité est ceint de murets : séparé et réuni à renforts d’adobes et de moellons. La tendance actuelle est au mirador de potager. Malgré les apparences, ce qui a fleuri chez l’un, greffé sur un arbre du lopin voisin, n’a plus de racines chez l’un, et guère de futur chez l’autre. Enté à la va-vite, souvent, à présent, le greffon dépérit, le greffé s’épuise. Entre voisins, on n’en cause pas : il faut tenir son rang de riverains. Les proximités de façade se panachent ou non, à leur guise : il n’y a que la nuit que tous les chats sont gris. C’est pourquoi, dans l'épaisse pénombre actuelle – quand sortirons-nous de cet imbécile vingtième siècle ? —, je préfère de loin landibardiner sur les murs mitoyens. Avec les chats.

J'ai donc connu un temps en vue de l'ombre des jeunes filles en fleurs, et me voici à la recherche des lumières dans notre lotissement actuel. Les murets sont glissants, les chemins de traverse mal famés : sans lumière, je n’y vois et n’y entends goutte. J’ai envie de ne tomber ni chez une vieille folle ni chez un jeune pervers. Les chemins de ronde sont pourtant ma piste de danse.

(à suivre)

 

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