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18 mars 2011 5 18 /03 /mars /2011 11:45

Dès les premières pages crissantes de

« l’Obituaire de Groenendael dans la forêt de Soignes »

Où j’ai rendez-vous avec Godeverd van Wevele...

« Un nom pareil, ça ne s’invente donc pas », m’a dit l’un.

« Tous les noms sont inventés, seuls les hommes naissent nus »,

Ai-je répondu à l’autre, die kent niet het Vlaate Land franstalige.

« Ah, mais en mars, ça pleut, c‘est comme ça »,

a jouté Jiminy Cricket dans mon dos : facile, trop facile

quand a un parapluie et un Pinocchio romain

à cramer en languettes pour se chauffer !

 

Moi, je ne lis sans cesse qu'un

mur vert et sombre derrière les lignes d'encres,

Comme le ronronnement d’une chaudière dans la mémoire :

« La forêt de Soignes et son impénétrable mystère »

C'est un refrain qui court de livre en livre…

Dans la chaleur douce du salon rhénan où frétille mon écran,

Je vois s'incliner le bout des branches chargées de bourgeons

Chargées de résine, de feuillages épineux : à force de peigner

les brumes et les légendes, fatigués, les dents pleines de pluies et de rosée

Toutes les branches se penchent, se penchent

jusqu’à la révérence suante

Jusqu'à embrasser le terreau

où l'herbe croit,

où la vie s'égoutte

sons et bruits gourds


Rideau vert sur fond de mousseline dans la bouche sombre où le reste

   — passé, étés, moines et satyres — a été englouti, dégluti, peu à peu.

Ne demeurent qu’une piste cyclable, et quelques randonneurs

Embâchés comme les jeunes pousses au bord des serres qui les tiennent

Ne me restent entre les doigts que quelques menus fragments du menu :

Ruusbroec, den XII doghenden, Meester Eggaert en de ombekende leek

ou bien le « bon cuisinier de Groenendael » : miettes dans la barbe verbe des prairies

 

Je regarde là où les biches se cachent à l'orée, où les crinolines des arbres dansent,

Où la vie étend sa lessive, en longs fils avachis entre des poteaux écailleux

dégouttants de rinçages sans fin,

quelques fauvettes d'y ébrouent étonnées

de ces rideaux de prières tibétains entre deux cochonailles,

Je regarde vers un temps lointain et d'aujourd'hui où

« la pluie impose d'avoir une vie intérieure intense »*,

Et vers la forêt, « La forêt de Soignes et son impénétrable mystère »,

La forêt sous la pluie depuis des siècles,

Comme une aptitude à se laisser digérer dans la bouche sombre

Asile mais lorsque l’été sera fournaise, ou bien l’hiver tenailles de fer,

À condition de s’évanouir dans le bleuté sombre du chemin ocre

Qui s’estompe et s’estompe sous les amygdales des arbres des arbres

détrempés sous les arbres sous les arbres détrempés estompés

 

 

 

 

* Citation de Julos Beaucarne.

 

 

 

 

 

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