J’aimerais bien me lever et rêver encore,
Sans avoir à porter la lourdeur de mon corps.
Au grenier, mes illustrés s’effritent sous mes doigts
Momies desséchées en poussières de n’importe quoi.
Je ne peux pas être plus que ce que j’ai été
Tantôt tous les amadous de mes automnes
Viendront pour m’embraser comme un seul homme
Que j’ai toujours été…
Arthur Rimbaud vend des armes en Afrique
Johnny Walker y est son seul et unique ami
La fée Clochette se tortille en coco-girl
Dans une disco un jour à Londres, un jour ailleurs
Tom Sayer est un junky repenti à l’asile
Alice vend des voyages low cost à des quadras
Oliver Twist joue son chômage au poker
Al Addin et Simbad sont enfin ami-ami
Dans une madrasa du côté de Karachi
Frisson garanti à vie contre leur mort :
J’aimerais bien me lever et rêver encore.
L’an passé, Blanche-Neige a hérité des sept nains :
Avec deux trois cailloux et une chiropraxie totale
Elle sort son spleen dans les hammams des cures thermales…
L’effigie du Che scintille en mignons néons criards
Sur la Maison Mère de Rebelle Commercial™ :
Celle qui vend Basquiat en jolies cartes postales.
Être libre est tellement obligatoire,
Qu’être docile n’est plus vraiment rédhibitoire.
J’ai juste une divine sueur perlant mon aurore
Le front brûlant posé sur la vitre de la mort :
J’aimerais bien me lever et rêver encore.
Pour saupoudrer ce lent calvaire de vivre fade,
Les jours se suivent en cortège, un pataquès en final
Le chien filocheur de Mozart en bière est à la une
Ses jappements sont trop charmants, bien mieux qu’Amadeus
La radio rengaine qu’il n’y a rien de rien à faire,
Mais ne partez pas : « les soldes sont revenues ! »
À Katmandou, comme partout parle la poudre,
Sous les pavés de Paris, deux mois par an, il y a la plage,
Les enfants défient leurs parents à coups de soifs très sages.
Qui a goudronné les chemins de traverse de nos songes ?
Qui a brodé nos vérités en séries limitées
Sur les poches de nos jeans, vendues en discount ?
J’aimerais juste me lever et rêver encore
Quitte ou double, dans le fatras des imprévus
Faire un strike dans le fracas des empires obsolètes
Loin des fenêtres peintes en trompe l’œil sur l’ennui
J’aimerais juste me lever et me rêver encore homme
J’aimerais garder les yeux grands ouverts
Papillons baillant sur l’envers des décorums :
J’aimerais bien que les matins me rêvent encore homme…